Alea jacta est…

Cette phrase célèbre aurait été prononcée par Jules César lorsque, à la tête de ses légions, il décida de franchir le Rubicon pour entrer dans Rome, ce qui était expressément interdit par les lois de la République. Plus couramment aujourd’hui, on dit simplement : « Le vin est tiré, il faut le boire ! »

La situation, à vrai dire, est assez inédite. Le MR, qui représente un gros quart des électeurs de Wallonie et de Bruxelles, a décidé de s’allier seul avec trois partis flamands qui représentent ensemble les trois quarts des électeurs de Flandre. Mieux encore, malgré ce « déséquilibre » dans sa composition, le gouvernement est dirigé par un francophone, Charles Michel, alors que la NVA qui est le plus grand parti du pays se satisfait de trois ministres et de deux secrétaires d’Etat. Le PS au pouvoir en permanence depuis 25 ans est rejeté dans l’opposition du niveau fédéral.

Comment en est-on arrivé là ?

Certains, à l’évidence de mauvaise foi, insinuent que le choix du MR serait inspiré par une volonté de revanche, écarté qu’il a été des majorités en Wallonie, à Bruxelles, en Fédération Wallonie-Bruxelles. Rien n’est plus faux. Ce sont les autres qui ont voulu forcer le destin. Le PS et le CDH se sont précipités dans les bras l’un de l’autre à une vitesse surprenante. Au nord du pays, la NVA et le CDNV ont décidé de s’associer tant dans le gouvernement flamand qu’au niveau fédéral, ce qui excluait d’office le PS, pour cause d’incompatibilité. Si le MR est seul, côté francophone, ce n’est pas parce qu’il l’a cherché, c’est parce que le CDH, qui était sollicité, a préféré déserter.

Que faut-il craindre ?

Le gouvernement, c’est acquis, dispose d’une vraie majorité au sein de la Chambre. Pour réussir à gouver- ner dans la durée, cela ne suffit pas. Il faut avant tout inspirer confiance à la population pour qu’elle accepte les mesures annoncées. Sur ce plan, je vois trois risques.

Comme les débats parlementaires l’ont montré à propos du Ministre Jambon et du secrétaire d’Etat Francken, il y a au sein de la NVA une fraction d’électeurs et d’élus qui sont proches de ce que le nationalisme flamand a de plus ambigu. Il ne faudrait pas qu’ils récidivent! Le deuxième risque est lié à la difficulté pour les forces de gauche en Wallonie d’accepter les mesures proposées par un gouvernement qualifié par eux d’ultra-droite. L’agitation actuelle est-elle un feu de paille ou un signe annonciateur de futurs affrontements permanents ? Ce risque pourrait d’ailleurs devenir plus menaçant si, au lieu de choisir les mesures les plus efficaces, la majorité se laissait guider par une approche trop idéologique et doctrinaire : « Le grand soir de la droite est arrivé, allons-y carrément !»

Que nous est-il permis d’espérer ?

Ne nous faisons pas d’illusion : le chemin à parcourir est long et plutôt escarpé. Notre pays a besoin de profondes réformes structurelles : notre système de pensions n’est pas soutenable à terme, la compétitivité de nos entreprises doit être améliorée, les déficits budgétaires doivent être résorbés, le déficit de qualifications de nos jeunes est alarmant, l’immigration doit être mieux contrôlée.

Le gouvernement de Charles Michel réussira pour autant que deux conditions soient réunies.

Il doit être uni et chercher ce qui peut rassembler plutôt que diviser.

Mais il faut aussi que le contexte extérieur soit favorable. Si la zone euro ne retrouve pas la croissance, notre pays peut tomber en récession; dans ce cas, les efforts demandés paraîtront illégitimes, au vu de la maigreur des résultats obtenus.

C’est le paradoxe : plus d’unité et mieux d’Europe, ce sont les deux clés du succès de Charles Michel.

Bonne chance Charles.

Mots-clés :


Dernières vidéos

Voir toutes les vidéos »